L’Orchidée, Danse et Musique Vivantes - Quelques textes
L’Orchidée, Danse et Musique Vivantes - Quelques textes
1 janvier 2013
« Terra poetica » Note d'intention projet 2013
L'Orchidée, Danse et Musique Vivantes
“Danses pour ceux qui sont là...”
Projet 2013
Présentation
«Terra poetica
Dans l’horizon de la terre telle qu’aujourd’hui dévastée...
- une itinérance poétique en quête d’images et d’énoncés offrant motifs
pour le déploiement d’une danse...»
L’édition récente en français de «Les limites à la croissance (dans un monde fini) - le rapport Meadows, 30 ans après» (2004 pour l’édition anglaise, 2012 pour la version française), ou la lecture de l’excellent livre de Jared Diamond : Effondrement (titre anglais: «Collapse: how sociéties chose to fail or succeed» -2005), ou cet article du Monde du 8 juin 2012 titré: «La biosphère mondiale à la veille d’une crise «irréversible»», tous ces écrits indiquent sans ambigüité que l’horizon qui est le nôtre aujourd’hui est celui d’une terre en train d’être partiellement dévastée.
Ainsi, Jared Diamond, biologiste et géographe écrit: «Les processus par lesquels les sociétés anciennes ont causé leur propre perte en endommageant leur environnement sont au nombre de huit, dont l’importance relative varie selon les cas: la déforestation et la restructuration de l’habitat, les problèmes liés au sol (érosion, salinisation, perte de fertilité); la gestion de l’eau; la chasse excessive; la conséquence de l’introduction d’espèces allogènes parmi les espèces autochtones; la croissance démographique et l’augmentation de l’impact humain par habitant.» puis: «Les problèmes environnementaux que nous devons affronter aujourd’hui sont identiques aux huit problèmes qui ont causé la perte des sociétés anciennes, mais quatre nouveaux s’y ajoutent: «Les changements climatiques causés par l’homme; l’utilisation de produits chimiques toxiques dans l’environnement; les pénuries d’énergie; l’utilisation humaine maximale de la capacité photosynthétique de la terre.» (Effondrement p18-20)
Les auteurs du rapport Meadows et de son actualisation 30 ans après, écrivant, pour leur part: «L’économie humaine utilise aujourd’hui tant de ressources capitales et produit tant de déchets qu’elle n’est pas soutenable. Les sources se tarissent, les exutoires se remplissent et, pour certains, débordent. La plupart des flux ne peuvent être maintenus sur le long terme, même à leur débit actuel, à fortiori s’ils s’intensifient. Nous estimons que beaucoup vont atteindre un pic puis décliner au cours de ce siècle.
Ces flux élevés ne sont pas nécessaires. Des changements au niveau de la technique, des modes de répartition et des institutions pourraient les réduire fortement tout en maintenant et même en améliorant la qualité de vie moyenne des habitants de la planète.
Le fardeau que les hommes font peser sur l’environnement dépasse d’ores et déjà les limites soutenables et ne pourra durer plus d’une génération ou deux. Conséquence: on constate déjà de nombreux impacts négatifs sur la santé et sur l’économie.» (p101-102)
Quant à l’article du Monde du 8 juin 2012, cité plus haut, il relate qu’ une étude «conduite par Anthony Barnosky, chercheur au département de biologie intégrative de l’université de Californie à Berkeley(Etats-Unis) et co-signée par une vingtaine de chercheurs issus de plusieurs disciplines, appartenant à une quinzaine d’institutions scientifiques internationales pointe l’imminence -c’est-à-dire, aux échelles de temps planétaires, d’ici à «quelques générations» - d’une transition brutale vers un état de la biosphère terrestre inconnu d’Homo sapiens depuis l’émergence de l’espèce, voilà quelque 200 000 ans.(...) Il est projeté que dans le siècle, les climats rencontrés aujourd’hui sur 10% à 48% de la superficie de la terre aient disparu et que des conditions climatiques qui n’ont jamais été rencontrées par les organismes actuels règnent sur 12% à 39% de la surface de la planète»
De tout cela, il ressort que les modalités mises en oeuvre et pratiquées aujourd’hui par les humains pour habiter cette terre s’avèrent dévastatrices et donc, à très prochain terme mortifère. Elles le sont déjà de façon manifeste pour nombre d’espèces animales et végétales qui constituaient pourtant une immense richesse en terme de potentiel de biodiversité.
Dans un tel horizon, face à un tel constat, comment - et vers où - se projeter ?...
En 2011, nous avions titré le projet de L’Orchidée:«... En l’écoulement incessant de toute chose - ainsi habitons-nous en poésie cette terre.». Peut-être est-ce dans cet «habiter en poésie» que réside un appui possible pour prendre pied, malgré tout, dans l’horizon de cette terre telle qu’aujourd’hui dévastée ?!...
Nous allons donc tenter de déployer notre projet pour l’année 2013 comme une itinérance poétique, en quête d’images et d’énoncés offrant motifs pour le déploiement d’une danse; nous appuyer sur des énoncés poétiques pour nous souvenir avec Hölderlin que: « ...plein de mérites, mais en poète habite l’homme sur cette terre.»; et que les limites d’un monde fini, d’un monde aux ressources limitées et pas nécessairement renouvelables doivent peut-être aujourd’hui nous inciter désormais à nous soucier un peu plus de la qualité de notre façon d’habiter en deçà de cet horizon qui a désormais cessé de fuir, et d’apprendre à mettre en oeuvre des modalités d’être un peu moins dépensières ou consommatrices de ces ressources que nous savons à présent limitées, et un peu plus poétiques en terme de rapport au temps, de disponibilité et d’ouverture à l’autre.
Le botaniste et spécialiste des arbres Francis Hallé parle de la découverte récente de principes de co-évolution entre la faune et la flore de certains milieux. Jeremy Rifkin (auteur de «La troisième révolution industrielle - 2012) parle, lui, de relations de latéralité à développer en place de celles d’ordre hiérarchique et pyramidale habituellement à l’oeuvre; Construire et développer une pratique des relations de latéralité; des relations latérales et équilibrées; équilibrées parce que latérales. C’est ce que nous allons nous efforcer de mettre en oeuvre en 2013; en effet, 7 des 10 spectacles différents projetés procèderont de la co-présence de 2 danseurs, oeuvrant au déploiement en situation d’une relation latérale, libre et ouverte, déterminée par le choix et l’agencement d’un certain contexte énonciatif...
Ce sont là sept pistes d’un travail en cheminement qui s’efforce d’assumer cette coopération active et fructueuse avec d’autres danseurs d’horizons différents: Sarah Nassar, danse d’expression butô, Juan Jimena, danse flamenco d’action, Fanida Besseghir, danse orientale, et moi-même, Roland Paulin, danse, disons intemporaine.
... Le souci de concilier, de conjuguer, sa propre démarche avec la démarche d’un autre, différent, porteur d’une singularité et de modalités propres à la manifestation de sa pratique artistique en situation; Le pari fait, la confiance assumée, qu’il y a une rencontre possible, dans le respect des altérités respectives et le refus des rapports de domination; le pari fait d’une coopération possible,... à construire... dans et malgré l’horizon de cette terre telle qu’aujourd’hui dévastée.
Le projet de L’Orchidée pour 2013 se déclinera donc en 7 propositions distinctes, soit 10 spectacles différents, mettant en oeuvre la participation active de 11 artistes:
4 danseurs ou danseuses: Sarah Nassar (danse d’expression butô -Toulouse), Juan Jimena (danse flamenco d’action -Colomiers), Fanida Besseghir (danse orientale - Toulouse) et Roland Paulin (danse intemporaine -Toulouse)
4 musiciens : Masako Ishimura (flûtes traversières), Rébecca Féron (harpe), Jean Christophe Décéa (oud -luth) et Marjolaine Cambon (viole de gambe).
2 porteuses de chant : Pascale Fauveau et Christine Bonnays
2 porteuses de textes lus : Christine Bonnays et Malika Gessinn.
Voici une présentation succincte des huit propositions projetées :
Marcher-écrire, gravir... avec Jacques Dupin... -I, -II, -III
Poète contemporain (né en 1927) Jacques Dupin est l’auteur d’une poésie âpre et tranchante, concise précise, épurée... appréhendant le monde à travers l’entrelacs toujours incertain de l’être, de l’autre, et du monde, en sa multiplicité fragmentée. Sensibles à cette poésie, nous avons voulu la porter à la situation, et la partager ainsi avec le public...
Distribution: Sarah Nassar (danse d’expression butô ), Roland Paulin (danse); Masako Ishimura (flûtes traversières, sur les volets I et III ), Marjolaine Cambon (viole de gambe, sur le volet II).
Dimanche 27 janvier 2013 (18h), dimanche 31 mars (18h), dimanche 6 octobre (18h).
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Le vagabond de Sonhakdong ou Ch’onnyonhak, une grue de mille ans
Deux très beaux films du grand réalisateur coréen Im Kwon Taek, La chanteuse de Pansori (1993) et Souvenir (2007), ont été tirés d’un recueil de cinq nouvelles (formant un tout) de Yi Ch’ongjun: Les Gens du Sud (1978, traduction Actes Sud 2007). C’est de l’une de ces cinq nouvelles que s’inspirera ce spectacle, porté par la lecture et le chant de Christine Bonnays et par la flûte de Masako Ishimura, et par la danse de Roland Paulin.
Distribution: Christine Bonnays (lecture et chant), Masako Ishimura (flûtes traversières) et Roland Paulin (danse).
Dimanche 17 février 2013 (18h)
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Dans les pas de Saïgyô, au Printemps...
Saïgyô (1118 -1191) est sans doute l’un des piliers de la littérature classique japonaise. Poète-voyageur, il a beaucoup arpenté..., composant des poèmes exprimant un certain rapport au monde, dans un sentiment d’harmonie profonde avec ce que nous appelons la Nature...
Distribution: Roland Paulin (danse); Masako Ishimura (flûtes traversières).
Dimanche 21 avril 2013 (18h)
Hier aux limites... -I, -II
Depuis 2010, avec Juan Jimena, danseur flamenco d’action, nous avons entrepris de confronter nos pratiques au sein des différents spectacles que nous avons réalisés ensemble et présentés dans le cadre des saisons 2010, 2011 et 2012 de L’Orchidée. Nous allons nous efforcer de poursuivre en 2013 cette hybridation étrange au sein d’un même spectacle de deux modes d’expression par la danse si dissemblables, mais qui ont la danse et l’intuition aigüe de l’être-en-situation en commun... Le «thème» des spectacles qui seront présentés a à voir avec l’espace libre et ouvert tel que le vivent les peuples nomades des toundras sibériennes; il a à voir également avec les contraintes que font peser aujourd’hui sur ces peuples les sociétés industrielles contemporaines et leur appréhension strictement quantitative de la réalité du monde.
Distribution: Juan Jimena (danse flamenco d’action) et Roland Paulin (danse); Masako Ishimura (flûtes traversières)...
Samedi 25 mai (20h30), dimanche 20 octobre (18h).
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Les jardins du nomade... (-III)
Le titre de ce projet est l’emprunt du titre d’un livre rare qu’a consacré une anthropologue canadienne à certains groupes Aborigènes d’Australie de la région des Balgo Hills - ou Wirrimanu, suivant la toponymie locale- une communauté aborigène située aux confins nord du désert de Gibson, au sein du «désert occidental». Cet énoncé est celui qui traduit et synthétise le mieux les fils conducteurs qui ont conduit et tressé les faisceaux de préoccupation qui ont sous-tendu à l’émergence de cette proposition... «A l’école» de la culture traditionnelle contemporaine des Aborigènes d’Australie, et ce à travers la découverte de leurs peintures, et la lecture et l’étude des passionnants écrits de Barbara Glowczewski, l’une des grandes anthropologues françaises, spécialisée sur ce sujet, la question posée de la survie alimentaire de «l’homme premier», dans une relation «écologique» et donc durable à la Terre, Terre «première» (et de toute évidence existentielle nous concernant: «dernière»), Terre «ancestrale», s’il en est, sachant aujourd’hui pertinemment que «l’intrusion de Gaïa», dont parle la philosophe épistémologue belge Isabelle Stengers, ne promet pas forcément qu’elle puisse le demeurer encore longtemps, «ancestrale», pour nos descendants, compte tenu des menaces qui pèsent sur elle du fait de nos modes de vie et des modèles outrageusement consuméristes qui nous sont continûment proposés... La question posée d’envisager des alternatives à une logique productiviste ambiante et à l’aveuglement qui l’accompagne... la question également posée de comment faire sens à plusieurs, sans imposer de rapports de domination, en demeurant de pleins-pieds dans l’ouverture et la fluidité de la relation, d’une relation vivante en constante transformation et devenir... et la question posée des outils pour travailler sur de telles «bases»... la question posée, enfin, de l’interrelation fertile du point de vue du déploiement d’une danse, qui peut exister, qui peut opérer entre le tracé gestuel de motifs picturaux, l’énonciation de paroles narratives, descriptives, explicatives, ou poétiques, et la modulation d’un souffle portant à l’émergence d’un chant... C’est un peu là ce à quoi nous nous sommes attelés avec l’élaboration et la réalisation de cette proposition dont les deux premiers volets ont été présentés en 2012.
Distribution: Sarah Nassar (danse d’expression butô et lecture), Pascale Fauveau (chant et lecture), Roland Paulin (danse et lecture).
Samedi 15 juin (20h30).
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Féminité orientale...
En relation à des poèmes choisis de Pédro Salinas, Ghérasim Luca, la rencontre en danse de Fanida Besseghir, danse orientale, et de Roland Paulin, danse, dans les miroitements chromatiques de la musique de Jean-Christophe Décéa, au luth oriental (oud), et le vent des flûtes de Masako Ishimura...
Distribution: Fanida Besseghir (danse orientale), Roland Paulin (danse); Jean-Christophe Décéa (oud - luth) et Masako Ishimura (flûtes traversières).
Dimanche 22 septembre (18h)
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Plaidoyer pour l’arbre...-I
Par ses livres et par ses conférences, le botaniste français Francis Hallé nous fait découvrir les extraordinaires facultés des arbres; Leurs capacités inimaginées... C’est à la découverte de certains de ces phénomènes liés à l’arbre que nous allons nous intéresser dans la réalisation de ce spectacle.
Distribution: Roland Paulin (danse), Malika Gessinn (lecture) Rébecca Féron (harpe), et Masako Ishimura (flûtes traversières).
Dimanche 24 novembre (18h30) dans le cadre de Minim’arts 5.